Voitures et écologie

Voiture à air comprimé et voiture à 2000 euros chez Tata

Avec deux nouveaux modèles, le constructeur indien Tata, a bien l’intention de chambouler le marché mondial de l’automobile. Au-delà des parts de marché, ces deux nouveaux modèles vont avoir un impact social et environnemental significatif.

Dans les années 1990, lorsque le français Guy Nègre commence à travailler sur un modèle de voiture à air comprimé, il passe pour un savant fou dans une industrie où les parts de marché à l’exception de celles grignotées par trois constructeurs japonais ont peu évoluées.

 

Dix ans plus tard, dans un marché de l’énergie en plein recomposition qui redoute la fin de l’air pétrole et où l’argument « environnement » s’impose progressivement en levier commercial, son concept de voiture à air comprimé occupe le devant de la scène. Mais c’est un nouvel entrant sur le marché mondial, le constructeur national indien d’automobiles qui a saisit l’opportunité et acquis une licence auprès de MDI la société fondée par Guy Nègre.

 

La voiture à air comprimé fonctionne sur un principe très simple : la force de l’air comprimé contenu dans un compresseur actionne des pistons qui permettent de transmettre une force motrice à l’automobile. L’autonomie est réduite (80km à chaque recharge) et convient aux utilisations urbaines. Il suffit de brancher la voiture sur une prise de courant pour lui permettre de recompresser de l’air dans le compresseur et de redonner 80km d’autonomie au conducteur.

 

Cette technologie est assimilée par le concepteur et le constructeur à une technologie « propre » dans la mesure où il n’y a pas de rejet de gaz carbonique, participant à l’effet de serre. Par ailleurs, compte tenu du prix de l’électricité actuel, le véhicule est économique, puisque le plein (qui permet de rouler durant 80km) revient à seulement 1,5 euros.

 

Rappelons qu’un véhicule alimenté par l’électricité, bien qu’il n’émette pas directement de gaz carbonique, participe à la production de déchets: nucléaire si l’électricté est produite dans un pays comme la France ou de gaz carbonique si l’électricité est produite comme c’est le cas en Chine ou en Inde, par des centrales électriques fonctionnant au charbon.

 

Mais Tata lance également en ce mois de janvier un nouveau véhicule qui va participer de façon dramatique à l’augmentation du parc automobile mondiale : la voiture à 2 000 euros.

 

Renault/Dacia avait frappé un grand coup le monde de l’automobile en 2004 en lançant la Logan, la « voiture à 5 000 euros ». Quatre ans plus tard, Tata fait plus fort en lançant la Tata Nano, une voiture que l’on pourrait qualifier de Smart du pauvre. Destinée aux marchés asiatique, la Tata Nano est un véhicule quatre places en théorie, mais conçu surtout pour accueillir 2 personnes et leur bagages aux standards européens. En Asie, on devine que la classe moyenne émergente « casera » tant bien que mal toute la famille dans ce pot à yaourt.

 

Socialement, la Tata Nano est un vrai progrès pour les pays émergents : on pourrait assimiler cette révolution au phénomène de la coccinelle Volkswagen en Europe. Les salariés des classes moyennes des pays asiatiques vont enfin avoir l’opportunité de posséder une voiture. Mais dans un monde déjà saturé en rejet de gaz carbonique, la Tata Nano risque d’accélérer encore les émissions de CO2.

 

Tata Motors, constructeur définitivement innovant, met donc en exergue les paradoxes d’un ordre économique mondial qui est confronté à la fois à une demande légitime des populations du tiers monde à entrer dans la société de consommation, à une quantité de ressources disponibles (les deux phénomènes conduisant à une augmentation du prix des matières premières) et à un droit individuel à polluer que l’on découvre limité.

 

Est-ce à dire qu’il n’existe pas d’alternative entre laisser les populations des pays en développement dans le dénuement et détruire la planète à petit feu ’

 

Que nenni, compte tenu des gaspillages divers et variés, des modes de production hérités du 20ieme siècle qui privilégient la rentabilité économique de court terme, une forte marge de manoeuvre existe autant au niveau des processus de production et de distribution que des habitudes de consommation.

 

C’est notre défi en ce début de 21ieme siècle que de provoquer la 4eme révolution industrielle, à la fois économe en matière première, soucieuse d’une vision de long terme de gestion des ressources et de répartition mondiale des richesses produites.

 

Peut-être un modèle qui servirait de fondement à la renaissance du parti socialiste ’

© 2008- . Tous droits réservés Raphaël Richard